Gabriel
Toute vie se doive d'être préservée.Il s'agit d'un grande fauve, à la beauté ineffable. Il possède une crinière hirsurte et d'immenses cornes d’albâtre. Tout en musculature, la bête reste imposante. De ses quatre mètres d'envergure pour quatre cent kilos, il intimide et force le respect. Bien que doté généralement d'un calme placide, Akoyala se montre très protecteur envers la Charité.
Deux pupilles sinoples, des lèvres fines, des traits délicats, un visage qui se veut avenant. Esperia est une femme humble dans son caractère et sa tenue. D'une indicible bonté, son vaisseau mortel offre son soutien à des œuvres caritatives. La jeune mère de famille partage avec la Charité, des convictions profondes. Leurs croyances communes réchauffent le cœur de Gabriel qui apprécient passer d'infimes instants avec Esperia.
Lorsqu'elle puise dans son essence, pour utiliser son pouvoir, les âmes présentes voient la souffrance des plus démunis et ne parviennent plus à ignorer leurs affres. Inconsciemment, leur main va chercher des pièces dans leur poche, dans leur sac à main pour les donner ensuite aux nécessiteux. Lorsqu'ils ont fait un acte de pure bonté, l'appel en eux cesse.
Gabriel peut former un immense mur courbé par la pensée, en manipulant l'eau. Celui-ci, se dresse devant elle pour la protéger d'attaques. Selon son envie, elle peut le déplacer à tout instant, dans l'angle de la menace.
Forgée par la pensée, l'eau se transforme en lames qui frappent fort ses adversaires et peuvent couper la chair.
Aux prémisses du monde, alors que les premiers hommes demeuraient encore au Paradis, Gabriel éprouvait envers Lilith, un sentiment de sollicitude. Chassée par Adam, celle-ci ne possédait comme toute consolation que sa propre solitude. Lorsqu'elle chercha vengeance, Gabriel ne condamna pas ses représailles. Plus clémente que le père fondateur, la future Charité voyait là, le fruit d'une profonde amertume. Elle ne s'interposa pas dans le jugement de Dieu bien qu'elle éprouve un désaccord. Sentiment qu'elle ressentie lors de la punition de Lucifel, en réponse à son éclat.
Lorsque le porteur de l'aube revint au Paradis, après sa condamnation, elle s'attendait à ce qu'il soit changé : une telle punition n'est pas sans conséquence. A la demande de Dieu, de ployer devant les descendants des premiers hommes, elle savait qu'il refuserait, qu'il rejetterait cette idée. Comme escompté, il créa une révolte, vite étouffée par l'idole créatrice. Alors qu'il se préparait à les châtier, elle s'éleva contre la mise à mort.
— Ils ont le droit à l'absolution. Ils étaient jadis, vos enfants aimés.
Dieu changea d'avis. Elle ne su jamais si ce sont ses mots, ceux de Raphaël ou d'Azraël, qui provoquèrent leur sursis. Sous ses yeux, un immense trou se forma dans le sol, avalant dans son gouffre, Lucifel et ses insurgés. Ils chutèrent dans l'abîme, pour ne jamais revenir. Elle savait que ce n'était qu'un au revoir. Tôt ou tard, il surgirait du néant pour chercher vengeance.
Les siècles passèrent, l'humanité faisait de plus en plus face à la recrudescence des créatures infernales et des engeances démoniaques. La Charité, voyant leur impuissance à combattre ce chaos offrit en secret l'alchimie et le secret des arcanes. Sous l'égide de l'Envie, son don se retrouva dénaturé. Les êtres altérés virent là un moyen de s'approcher de Dieu. Yavhé tempêta. Il lui fallait un coupable.
— Laissez moi porter le blâme.
Elle ne voulait pas que son féal se sacrifie. Elle pinça ses lèvres alors que son coeur se serrait.
— Tu n'as pas besoin de faire cela.
— Mon coeur saignera si vous vous retrouvez déchu. Vous n'avez pas à vous sentir coupable, c'est ma décision. Respectez là, je vous prie.
Elle baissa la tête d'assertion. Alariel avait fait son choix. L'archange lui offrit une plume, vague compensation avant que Dieu ne le chasse à jamais du Paradis. Il modifia les souvenirs de tous, outre Gabriel et Leviathan. Dans la mémoire de chacun, Alariel était le responsable. Il avait commis l'irréparable en offrant un secret du Paradis aux mortels. Chagrinée, la Charité porte en deuil, le sort de son féal.
Les siècles se succédèrent. Les tensions entre les entités célestes et les engeances démoniaques s’accrurent mais pas suffisantes pour éclater en guerre. Gabriel ne participa au batailles fomentées par les deux camps. Si généralement elle restait relativement calme et effacée, elle déprécia la décision de Dieu de détruire Atlantis. Elle craignait que le courroux divin ne provoque un conflit planétaire.
Celle-ci ne survint que des millénaires après. Alors que les légions démoniaques envahissaient la terre, les armées célestes intervinrent. Le ciel s'embrasa. Gabriel, en dépit de son horreur de la violence, participa à cette guerre. Épaulée de ses féaux, elle se confronta à Léviathan. Une vieille rancœur l'unissait à l'Envie. Elle comptait bien laver le nom d'Alariel. La bataille éclata entre elles, un véritable choc des titans. Malgré les siècles écoulés, ni l'une ni l'autre ne parvenait à obtenir victoire. Faisant preuve chacune de pugnacité, elles espéraient défaire l'autre.
Par la déflagration des pouvoirs, le nombre de mortels se raréfiait. Victimes d'une guerre qui n'était pas leur. Gabriel se sentit éplorée par tant de morts. Elle qui cherchait à vaincre l'Envie, elle constatait maintenant l'étendue des dégâts. Elle n'éprouvait plus le souhait de se battre. Alors qu'elle cessa d'attaquer, Leviathan lui porta un coup. Thanael s'interposa. Il sauva la Charité au prix de sa propre vie. Il s'éteignit dans les bras de Gabriel.
— Je ne peux te pardonner pour les nombreux innocents qui sont morts de ta main.
Touchée par un regain d'énergie, Gabriel défit l'Envie. Alors qu'elle obtenait un triomphe, elle n'éprouvait nulle joie. Amère, elle contempla la terre, ravagée par la guerre. Elle l'entendait presque supplier. C'est au moment où les Célestes sortaient conquérants qu'Azraël intervint. Par crainte de l’Émissaire de la mort, Lucifer et Michaël rappelèrent leurs légions.
Après une année, l'Orgueil et Yahvé se rencontrèrent. De leur échange, naquit le Grand Jeu. Si ses confrères voyaient en lui, une honte et une abomination, elle était plutôt satisfaite. Ainsi, l'humanité sera préservée d'une annihilation. A la reconstruction du monde, elle prit un certain plaisir à participer. L’œuvre achevée, elle fit comme tout immortel, vivre dans le secret.
Les siècles se succédèrent avant qu'un grand péril ne s'installe dans le Paradis. Touchés par un mal inconnu, les Élevés présents au Paradis soient périrent, soient se trouvèrent altérés dans leur propre essence. Dès lors, ils n'offrirent guère de respect aux archanges. Gabriel y voyait là, un dérangement, un déséquilibre dans le Paradis. Mais ses homologues et elle, ne pouvait rien y changer. Ces êtres perfides détenaient la protection de Dieu.
Supportant leur ruse, elle regarda les ères passer, participant parfois aux sauvetages des mageias et hybrides. Elle ne pouvait pas décemment contempler leur mort, sans agir. Ces êtres étaient innocents.
Alors que la paix semblait régnante, l'Oracle Blanc proféra la prophétie des cavaliers. Si les plus vindicatifs se montraient contre, Gabriel, n'émit aucun désaccord. Droite et digne dans son maintien, elle observa Dieu qui attendait sa position.
— J'accepte d'être la mère des futurs cavaliers.
Brouhaha et silence, lorsque l'Idole Créatrice le fit demander. Le lendemain même, Gabriel fit face à Lucifer, dans son vaisseau mortel.
— Tu sembles bien te porter.
Elle aurait voulu communiquer plus mais les mots ne vinrent pas. Dans le silence, l'un et l'autre, s'unirent. De leur union, elle enfanta. Durant neuf mois, elle resta sur Terre. Son subalterne s'occupa de prendre sa place, le temps de son absence.
A peine nés, on lui arracha les nourrissons, comme cela devait être. Son cœur se serra pourtant, elle ne chercha pas à aller contre les règles. Elle demanda à ce que l'un d'entre eux, soit dans une famille chrétienne. Sans un regard sur sa progéniture, elle retourna au Paradis. Elle savait que si elle restait, elle ne disposerait pas du courage nécessaire à l'abandon. Elle aurait cherché à les élever.
Aujourd'hui encore, elle veille sur ses enfants, avec un regard plein de chaleur.
Gabriel continuera ses actions pour préserver l'existence des Sang Mêlés et des Mageias.